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Textes & histoires
20 avril 2008

Triste fuite

Aihyla, en sanglotant, traversait le passage. Jamais sa tutrice ne lui avait parlé de ce souterrain... et pourquoi Mlle Clécilie avait ouvert le placard habituellement cadenassé avant le massacre? L'avait-elle prévu? Sa tutrice cachait peut-être d'autres secrets qu'elle ne pourrait jamais découvrir. Ses larmes redoublèrent en pensant au sort des habitants de Liaêsgaê. Pourquoi le Roi faisait-il tout ces massacres inutiles? Le souverain gardait toutes ses intentions pour lui, n'en parlant qu'à ses généraux.
Au bout d'un moment qui sembla être une éternité pour Aihyla, le tunnel s'arrêta.La jeune fille inspecta les parois mais elle ne trouva aucune trace de porte. Le désespoir qui l'envahissait petit à petit lui fit lever la tête: du plafond pendait une poignée...de trappe. Elle tira dessus et la trappe s'ouvrit avec difficulté.
En s'aidant des parois du passage, elle s'extirpa du tunnel et déboucha sur un sentier de forêt qui longeait Liaêsgaê. Elle remit les plantes, les ronces et les orties qui protégéaient la trappe et qui étaient parties lorsqu'elle l'avait ouverte. Elle entendit, au loin, des hurlements qui devaient provenir du village. En y repensant, elle sentit une vague de tristesse monter en elle et, pour ne plus y penser, se mit à courir, courir comme elle ne l'avait jamais fait.
Elle courut pendant une dizaine de minutes et s'arrêta, haletante, dos à un arbre. La jeune fille réalisa qu'elle ne pourrait pas rejoindre les elfes à pied. Il lui fallait un cheval.
Elle pensa alors aux trois magnifiques juments que possédaient le boucher et sa femme. Autant le prendre, ainsi elles ne périraient pas... si cela n'était déjà fait.
Aihyla retourna donc près de Liaesagaê.
Ne pouvant s’en empêcher, elle dissimula ses affaires sous un rocher et s’approcha de son village. Toutes les belles demeures étaient en feu, les cadavres jonchaient les rues, les villageois encore vivants hurlaient en tentant d’échapper à la mort.
Le cœur au bord des lèvres, la jeune fille retourna près de son sac, le sortit de sa cachette et se dirigea en courant vers le près des juments, des larmes ruisselants sûr ses joues.
Elle n’était plus très loin de l’enclos lorsque la jeune fille vit Iris, une des juments, galoper dans sa direction. La bête s’arrêta près d’Aihyla, les yeux affolés, les membres parcourus de tremblements. La jeune fille entendit alors des cris, des injures et des obscénités, des bruits de course derrière elle.
Sans plus réfléchir, elle monta sur Iris. A peine sa cavalière montée sur son dos, la jument partit à toute allure. La jeune fille avait souvent chevauché, mais jamais sans selle, et le voyage fut une épreuve. Bien qu’elle accompagna son destrier dans tous ses mouvements, ses jambes lui brûlèrent bientôt.
Une demi-heure passa ainsi, et Iris n’arrêta sa course que lorsque le village fut loin, loin, loin derrière elles.

                                                                                      ˜

Le soir vint, accompagné de milliers d’étoiles. Aihyla laissa Iris en liberté : la jument reviendrait toujours, elle le savait. De toutes manières, elle n’avait rien pour l’attacher. Elle sortit un duvet de son sac, et l’étendit sur le sol.
La jeune fille avait la gorge bien trop serrée pour avaler quoi que ce soit, aussi se coucha t-elle sans avoir mangé.
Elle mit plusieurs heures à s’endormir, ce soir là.

Elle pensait à tous ceux qu’elle connaissait, à Liaêsgaê, qui avaient certainement péri. Elle pensait au village, au boucher, à qui elle ne rapporterait plus de gibier, et aux deux autres juments qui accompagnaient souvent Iris. Celle-ci s’était couchée non loin d’Aihyla, sa robe brune se gonflant au rythme de ses respirations.

A force de se tourner et de se retourner dans son étroit duvet, Aihyla pensa à ses parents. Qui étaient-ils ? Pourquoi avaient-ils abandonné leur enfant ? Etaient-ils vivants ? Avaient-ils d’autres  filles, ou fils ?
La jeune fille avait souvent posé ces questions à sa tutrice, qui avait été dans l’incapacité de lui répondre.
Aihyla eut alors les larmes aux yeux : si tous les habitants de Liaêsgaê étaient morts, qu’elle n’avait plus de famille, elle était…seule. Mais elle sombra bientôt dans un profond sommeil, troublé de cauchemars et de rêves étranges.

˜

Quelque chose d’humide tapotait sa joue.

Un petit hennissement lui vint aux oreilles et Aihyla s’éveilla en sursaut.

-          Iris, murmura t-elle en découvrant la jument près d’elle, son museau tapotant sa joue. La voix d’Aihyla, habituellement claire et harmonieuse, était rauque. Sa gorge était sèche et nouée, et pourtant elle avait une faim de loup. Elle mangea une pomme sur les cinq que contenait son sac et but un peu d’eau. Après cela, elle se sentit mieux. Elle monta alors sur Iris et toutes deux continuèrent leur route. Pendant que la jument galopait, la jeune fille consultait la carte du pays. D'après le Sage de Liaêsgaê, les Elfes étaient dans une immense montagne, Dzentacerpla, située au sud du pays. Elle se trouvait à un bon mois de marche du petit village et à une semaine environ à cheval.

La journée passa, et Aihyla ne laissa Iris se reposer que quelques instants, juste le temps que la jeune fille se rassasie.

L'aprè-midi fut chaude. Aihyla et Iris, après avoir passé une forêt, débouchèrent sur une route.

-  La route du sud, commenta la jeune fille en consultant de nouveau sa carte. Lorsque nous verrons un petit chemin sur notre droite, il faudra s'y engager. Et c'est ce qu'elles firent. Iris trottait déjà depuis un moment lorsque des voix retentirent:

- Non! il faut l'apporter au Roi!

- Mais non, on la garde!

- il faut l'apporter au Roi, il nous récompensera!

- Non, Glorsk, on la tue. Un point c'est tout.

- C'est une Elfe, enfin! Le Roi...

- Je t'ai dit: NON!

La voix était rude, cassante, profonde, inhumaine.

Aihyla frémit. Un malfang! un malfang qui détenait une Elfe!

La jeune fille réfléchit: si elle voulait aller chez les Elfes, mieux lui fallait un guide , et elle ne pouvait pas la laisser mourir.

Sa décision était prise: elle allait sauver l'Elfe!

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